mercredi 27 mars 2013

"JANE EYRE" de Charlotte Brontë (Le Livre de Poche Classique)


"Charlotte Brontë a voulu relever le défi de créer une héroïne pas jolie et de la rendre intéressante. Elle a réussi. Malgré l'inégalité de leurs conditions sociales, Jane et Rochester sont égaux par l'esprit. L'amour naît entre eux par la parole. Rochester parle ; Jane écoute; il essaie de libérer l'oiseau de son rire enfermé derrière les barreaux d'une cage morale formée par son enfance misérable. Mais ses souffrances ont aussi donné à Jane un fondement inébranlable d'identité. C'est de sa force intérieure, de sa nature droite que l'ironique Rochester tombe amoureux. Ce roman raconte une grande histoire d'amour, où la tendresse l'emporte sur l'impossible, se devine dans le silence, l'ironie et l'absence. C'est l'histoire très romantique de deux âmes qui se devinent, se cherchent, se reconnaissent, se perdent et se retrouvent.
Catherine Cusset
Auteur de "Un brillant avenir" (Gallimard)


"Jane Eyre"

"Jane Eyre" est une évocation puissante et délicieuse de l'Angleterre victorienne à ses débuts. Brontë y dénonce les conditions scandaleuses dans lesquelles les pauvres subissent la loi des riches. Toutefois, une pudeur chrétienne - rappelons qu'elle est fille de pasteur - l'empêche d'aller trop loin dans ses critiques. Féministe avant l'heure, son regard social et psychologique sur les rapports des couples  lui ont valu, en son temps, les foudres de quelques chroniqueurs victoriens, mais l'admiration, plus tard, de femmes comme Virginia Woolf. Une féminité limitée par les interdits religieux et un remarquable manque d'intérêts pour la procréation, l'attitude de Charlotte Brontë envers les enfants est assez déconcertante. Certains ne manqueront pas d'y voir un funeste présage lorsque l'on connaît les circonstances de sa mort. Proche du conte de "Cendrillon", le succès de "Jane Eyre", jeune fille en marge, sans fortune et laide, est immédiat et l'histoire enflamme l'imagination de myriades de lectrices, elles-mêmes frustrées et révoltées contre l'injustice du sort.



Charlotte Brontë en quelques dates

1816 : Naissance le 21 avril dans le Yorkshire (nord de l'Angleterre). Elle est la troisième fille d'un pasteur. Maria et Elizabeth l'ont précédée. Branwell et Emily naîtront ensuite. Anne viendra au monde à Haworth où le pasteur Brontë exercera.
1821 : Madame Brontë meurt et sa soeur vient de Cornouailles pour tenir la maison de son beau-frère et s'occuper des enfants. Trois ans plus tard, les quatre filles aînées sont envoyées à l'école de Cowan Bridge.
1825 : Maria et Elizabeth succombent à une attaque de fièvre maligne à un mois d'intervalle. Les quatre autres enfants se retrouvent à Haworth où, sous la houlette de Charlotte, ils s'adonnent à la composition littéraire.
1835 : Elle est professeur dans le pensionnat où elle a fini ses études. Mais, hantée par l'écriture, elle peine à enseigner.
1842 : Elle part à Bruxelles avec Emily dans le pensionnat de Mme Héger. Elle s'éprend de M. Héger (il lui inspirera Rochester).
1846 : Elle écrit "Le Professeur" qui sera refusé par les éditeurs.
1847 : Parution de "Jane Eyre".
1849 : Anne meurt, après Branwell et Emily. Seule, Charlotte est désespérée. La même année paraît "Shirley". La popularité de ce roman a fait de ce prénom initialement de garçon un prénom de fille.
1853 : Parution de "Villette".
1854 : Charlotte, qui avait dans sa jeunesse éconduit deux prétendants, cède aux instances d'Arthur Belle Nicholls, vicaire de son père - survivant morose et souvent acariâtre de l'hécatombe familiale et presque aveugle - et l'épouse.
1855 : Elle décède le 31 mars, probablement enceinte.
1857 : Publication de : "Le Professeur".

L'histoire :
Jane Eyre est une jeune orpheline de dix ans. Confiée à sa tante par alliance, Mrs Reed, elle vit un enfer auprès de cette femme d'une sévérité effroyable et sans affection. Ses cousins, Eliza, John et Georgiana, ne lui épargnent non plus aucun sévice ni aucune humiliation. Face à cette famille si despotique et froide, même les domestiques ne se permettent aucun attendrissement envers la petite fille plus que malmenée. Jusqu'à ce matin de janvier, où dès l'aube, Jane est emmenée au pensionnat de Lowood...

Mon avis :
Une histoire haletante et pleine de mystères, d'une écriture à peine marquée par le temps qui se lit aisément et se dévore ! Les quelques longueurs du texte sont vite oubliées grâce au coup de théâtre qui, généralement, s'en suit.
Au-delà du romanesque teinté de gothique de l'intrigue, l'analyse psychologique de chaque personnage, tout en finesse et en justesse, tient une place majeure dans l'oeuvre de Charlotte Brontë. Sans être véritablement critique envers son époque, elle nous livre son regard acéré, presque un témoignage, sur cette Angleterre puritaine du XIXème siècle, sur sa bourgeoisie rurale, et sur le sort réservé aux femmes. Son héroïne, Jane Eyre, surmonte toutes les épreuves, toutes les humiliations, toutes les souffrances, toujours la tête haute. Elle ne se comporte jamais en victime. Elle fait face, avec dignité et volonté, à la rigidité et aux injustices de la société.

Un roman violent, cruel, d'une intelligence et d'une lucidité impressionnantes !
Un indispensable à toutes les bibliothèques !