jeudi 28 mars 2013

"CLAUDE GUEUX" de Victor Hugo (Le Livre de Poche)


Victor Hugo en quelques dates

(Dans le cas de Victor Hugo, on ne peut faire l'impasse sur quelques rappels historiques pour mieux comprendre son oeuvre.)

Cent cinquante ans après la parution des "Misérables", il est toujours d'actualité. Ecrivain illustre quoique controversé, Victor Hugo, par l'ampleur de son oeuvre et de ses engagements politiques, a gardé une place d'honneur au panthéon des lettres françaises.

26 février 1802 : Naissance de Victor Hugo à Besançon (Doubs). Elevé à Paris, loin de son père, Léopold Hugo, officier dans l'armée napoléonienne.
1804 : Napoléon est sacré empereur.
1807 - 1808 : Voyages en Italie, puis en Espagne, pour rendre visite à son père.
1811 - 1812 : Campagne de Russie.
6 avril 1814 : Adieux de Fontainebleau - Les Cent Jours
18 juin 1815 : Waterloo
1814 - 1815 : Premiers essais littéraires, d'inspiration royaliste.
1822 : Publication des premières odes et mariage avec Adèle Foucher, son amie d'enfance.
1823 - 1826 : Premiers romans : "Han d'Islande", "Bug Jargal".
1827 : "Cromwell". La préface de cette pièce constitue le manifeste du romantisme.
1829 : "Les Orientales", "Le Dernier Jour d'un condamné".
1830 : Révolution de Juillet - Louis-Philippe
1830 : Début de la bataille d'"Hernani", la pièce qui oppose les partisans du romantisme - dont Hugo a pris la tête - et les tenants du classicisme.
1831 : Publication de "Notre-Dame de Paris".
Mars-juin 1832 : Procès puis exécution de Claude Gueux.
1832 : Préface au "Dernier Jour d'un condamné".
1833 : Rencontre la comédienne Juliette Drouet. Leur histoire d'amour durera cinquante ans.
1834 : Parution de "Claude Gueux".
1838 : Parution de "Ruy Blas"
1841 : Elu à l'Académie française après plusieurs candidatures malheureuses.
1843 : Mort de sa fille Léopoldine.
1845 : Hugo devient pair de France.
1848 : Révolution de 1848 - Seconde République
1848 : Maire du VIIème arrondissement, puis député de Paris à l'Assemblée constituante.
1849 : Député à l'Assemblée législative. Se rapproche de plus en plus de la gauche républicaine.
2 décembre 1851 : Coup d'Etat de Louis-Napoléon Bonaparte. Un an plus tard, il se fait couronner empereur sous le nom de Napoléon III.
1851 : Opposant au nouveau régime, Hugo quitte Paris pour Bruxelles, puis Jersey.
1852 - 1853 : Publications contre Napoléon III : "Napoléon le Petit", "Les Châtiments".
1853 : Expulsé de Jersey, s'installe à Guernesey.


Sans Guernesey, point de Hugo. Le charme tourmenté de l'île anglo-normande inspire tellement l'exilé qu'il l'amène à produire, en moins de quinze ans, une oeuvre colossale. Pour mieux épouser l'endroit, il y bâtit une demeure à sa mesure : excessive et remplie de mystères.



1856 : Parution des "Contemplations".
1857 : Procès de "Madame Bovary" (paru en 1856) - Condamnation des "Fleurs du mal" pour outrage aux moeurs.
1862 : Parution des "Misérables".
1864 : Parution de "William Shakespeare".
1866 : Parution des "Travailleurs de la mer".
1869 : Parution de "L'Homme qui rit".
1870 : Guerre contre la Prusse - 1er septembre : défaite de Sedan et destitution de Napoléon III - Troisième République
14 juillet 1870 : Hugo plante un chêne des Etats-Unis d'Europe dans sa maison de Guernesey. Le 5 septembre, il regagne Paris.
Mars-mai 1871 : Commune de Paris - L'insurrection est écrasée.
1871 : Représentant de Paris à l'Assemblée nationale réunie à Bordeaux. Opposé à  la majorité conservatrice, il démissionne. Pendant la Commune, réside à Bruxelles. Sans approuver les insurgés, plaide pour la clémence à leur égard.
1874 : Publication des "Quatre-vingt-treize".
1875 : Sénateur de la Seine.
1883 : Achève la publication de "La Légende des siècles" (amorcée en 1859).
22 mai 1885 : Mort de Victor Hugo. Funérailles nationales. A Paris, deux millions de personnes assistent au transfert de sa dépouille de l'Arc de Triomphe au Panthéon.




L'abolition de la peine de mort

Sous l'Ancien Régime, la prison ne constitue pas une peine à part entière. Il n'y a pas d'intermédiaire entre les peines légères (amendes, par exemple) et les supplices physiques. La peine capitale est prévue dans un grand nombre de cas, et elle n'est pas contestée.

Pendant la Révolution française, l'idée de l'abolition de la peine de mort a souvent été agitée, mais sans résultat. On n'a rarement autant décapité que sous la Révolution. Seul apport de taille : la guillotine. Cette machine a été conçue comme un progrès : elle donnait une mort instantanée et sans douleur, à la différence des supplices des époques antérieures.

Au cours du XIXème siècle, le débat se poursuit avec vivacité. Il conduit partout à une raréfaction des exécutions capitales. Dans certains pays, l'abolition officielle vient parfois confirmer une disparition de fait : Italie (1847, rétablie en 1852, supprimée en 1860) ; Grèce (1862) ; Roumanie (1864) ; Portugal (1866) ; Pays-Bas (1870) ; Suisse (1874, mais certains cantons avaient anticipé) ; Norvège (1905) ; Autriche (1919). Il faudrait également citer certains Etats des Etats-Unis, et beaucoup de pays d'Amérique du Sud.

La première moitié du XXème siècle a connu une tendance générale au rétablissement de la peine de mort.

Depuis la Seconde Guerre Mondiale, la peine de mort tend à disparaître d'Europe. Elle a notamment été abolie en Allemagne (1949) ; en Angleterre (1970) et en France (1981). Aux Etats-Unis, la situation varie selon les Etats. Dans d'autres pays du monde (Iran, certains pays d'Asie...), la peine de mort est toujours en vigueur.


"Claude Gueux" (Le Livre de Poche)

Paru en 1834, inspiré par un fait divers remontant à 1831, "Claude Gueux" est un récit aussi bref qu'engagé : à la fois un tableau de la misère et une magnifique leçon de civisme où Hugo dénonce les injustices sociales de son époque, dans le sillage du "Dernier Jour d'un condamné". "Nous avons cru devoir raconter en détail l'histoire de Claude Gueux parce que, selon nous, tous les paragraphes de cette histoire pourraient servir de têtes de chapitre au livre où serait résolu le grand problème du peuple du XIXème siècle" écrit Hugo à la fin de son récit, après avoir retracé le calvaire de Claude Gueux, un ouvrier au coeur noble contraint de voler pour que sa compagne et son enfant ne meurent pas de faim. Condamné à cinq ans de prison, il purgera sa peine à la centrale de Clairvaux, où il deviendra le souffre-douleur du directeur des ateliers, "un de ces hommes qui ne résonnent au choc d'aucune idée, au contact d'aucun sentiment, qui ont des haines mornes et des emportements sans émotion". Ce tortionnaire qui s'identifie à Napoléon, Claude Gueux finira par le tuer à coups de hache avant de tenter de se suicider avec des ciseaux de couturière et d'être envoyé à l'échafaud. "La morale de cette histoire, explique Hugo, c'est que le peuple souffre et que cette détresse le pousse au crime." Modèle de pédagogie, "Claude Gueux" est aussi un vibrant réquisitoire contre la peine de mort, un des livres les plus fraternels de l'auteur des "Misérables".

Gueux : Celui qui fait métier de demander la charité, utilisant au besoin la ruse.


Mon avis :
Ce récit, de l'aveu même de l'auteur, ne raconte pas l'histoire exactement telle qu'elle s'est passée. Construit comme une fable, espérant atteindre toutes les consciences, Hugo donne à ce plaidoyer contre la peine de mort toute sa force, toute sa passion, toute sa révolte. En parfait orateur, Hugo fait de Claude Gueux le représentant du peuple dans la misère, convaincu qu'avec une meilleure éducation et des peines plus justes et plus humaines, nombreux crimes et délits seraient évités.

Ce court texte d'une grande puissance se lit d'une seule traite, avec passion et effroi.
Un indispensable !


"Messieurs, il se coupe trop de têtes par an en France. Puisque vous êtes en train de faire des économies, faites-en là-dessus. Puisque vous êtes en verve de suppressions, supprimez le bourreau. Avec la solde de vos quatre-vingts bourreaux, vous paierez six cents maîtres d'école."
Victor Hugo
"Claude Gueux"