jeudi 4 février 2016

"City on Fire" de Garth Risk Hallberg (Plon, 2016) - Premier roman


Garth Risk Hallberg est né en 1978 à Baton Rouge, en Louisiane. Il grandit en Caroline du Nord, auprès d'un père romancier et d'une mère enseignante. Après un cursus universitaire à Saint-Louis, puis à New York, il publie ses premières nouvelles dans le New York Times Magazine et le Prairie Schooner. Lecteur assidu de Don DeLillo et de David Foster Wallace, deux fois finaliste du National Book Critics Circle Award pour la qualité de ses critiques littéraires, il se lance en 2003 dans l'écriture d'un long roman de 900 pages autour de Manhattan.

2003... Un car le ramène à New York pour la première fois depuis l'effondrement des Twin Towers... Dans les écouteurs une chanson de Billy Joel composée en 1976...

"Les paroles évoquaient le crépuscule du New York des années 1970, un lieu étrange et interlope, à la fois dangereux et excitant, un repaire de voyous, de poètes d'avant-garde et de musiciens punk. Rien à voir avec la ville prospère, propre et sûre qu'elle est devenue ensuite, celle que je connaissais depuis mon adolescence. J'ai éprouvé à ce moment une immense nostalgie pour ce temps que je n'avais pas connu, pour cette ville plus risquée mais plus libre, et à cet instant précis, dans l'autocar, je peux dire que ce moment m'est venu. Pas simplement l'idée du livre, mais le livre lui-même, tel que je l'ai écrit des années après."

Après douze ans de travail, Garth Risk Hallberg nous livre une fresque urbaine ambitieuse qui nous conte admirablement la métamorphose d'une ville.

Contexte historique :

New York - 1976
Durant les années 1960, New York est rongée par les problèmes de logements et d'insalubrité. La ville est très sale et des millions de rats hantent les égouts. La dégradation rapide des logements favorise la spéculation immobilière sous toutes ses formes. Peu à peu, les classes aisées désertent le centre-ville, entraînant la fermeture de nombreux commerces. L'insécurité augmente et de graves émeutes noires éclatent à Harlem. Résultat : en octobre 1975, avec 13 milliards de dollars de dettes,  New York échappe de peu à la faillite. Le gouvernement de l'Etat, les banques et les syndicats s'associent pour éviter le chaos. Les finances sont redressées en moins d'un an.

Le Blackout de 1977 est une panne d'électricité dûe à un orage qui a plongé la ville américaine de New York dans le noir les 13 et 14 juillet 1977. Seul le quartier du Queens ne fut pas touché, dépendant d'un autre système d'approvisionnement électrique. Cette panne déclencha des pillages et des émeutes extrêmement violentes, et se solda par l'arrestation de 4000 personnes.





L'histoire :
Mercer et William, amants depuis plusieurs mois, s'apprêtent à passer ensemble ce soir de Noël 1976 dans leur appartement new-yorkais. Il n'y a pas couple plus improbable que celui-là. L'un, Mercer Goodman, gentil garçon, jeune professeur d'anglais de vingt-quatre ans, cache son embonpoint dans du velours côtelé et rêve secrètement d'écrire un jour le Grand Roman Américain. Actuellement, il est le premier enseignant Noir du lycée Wenceslas-Mockingbird de Greenwich Village. C'est là qu'il rencontre par hasard Regan Hamilton-Sweeney Lamplighter, la soeur de William, qui lui confie une lettre à remettre à son frère. L'autre, William Hamilton-Sweeney, héritier maudit d'une famille richissime, jeune punk Blanc de trente-trois ans, ancien junkie, ancien leader du groupe punk rock "Ex Post Facto", traîne son teint blafard dans New York sans aucune autre motivation que vivre sans entrave. Agacé par l'insistance de Mercer à ce qu'il ouvre cette fichue enveloppe placée constamment sous son nez, William claque la porte. A Grand Central, il croise Solomon Grungy qui lui annonce que les Ex Post Facto vont se reformer et qu'ils vont jouer le 31 décembre dans un club.
Le réveillon de Nouvel An arrive. Charlie Weisbarger, adolescent de dix-sept ans, est fou de joie. Ce soir, il assiste au concert des Ex Nihilo, nouveau nom des Ex Post Facto dont il est fan. Il s'y rend avec Samantha avec qui il compte bien conclure. Mais Sam le plante devant le club. Consciente des sentiments que Charlie éprouve pour elle, elle n'ose pas encore lui avouer qu'elle est la maîtresse d'un type de trente ans, Keith Lamplighter, avec qui elle a rendez-vous maintenant. De son côté, William annule leur soirée prévue au restaurant et invite son compagnon au concert punk. Peu à l'aise avec ce genre musical, Mercer refuse. William s'en doutait. Ulcéré par ce nouvel abandon, Mercer ouvre le fameux courrier destiné à William, y trouve une invitation et soudain décide de se rendre seul à la réception donnée par les Hamilton-Sweeney dans leur "château" de l'Upper West Side. C'est une fois sur place, piégé au milieu des mondains, que Mercer réalise son erreur. Regan, peu ravie, elle non plus, d'être là ni de jouer la comédie de l'unité familiale alors qu'elle annoncera prochainement son divorce d'avec son mari Keith, reconnaît Mercer et lui sauve la mise. Les deux âmes seules et blessées vont partager quelques confidences au balcon de la chambre d'enfant de Regan. C'est alors que Mercer croit entendre des coups de feu plus bas dans la rue...

Mon avis :
Pour avoir bénéficié d'une large médiatisation à sa publication, "City on Fire" suscite bien évidemment la curiosité et l'intérêt pour une épopée annoncée comme "ambitieuse" dans toutes les critiques littéraires. "Ambitieux" est en effet l'adjectif exact pour qualifier ce premier roman. Mercer Goodman, l'un des héros principaux du livre, rêve d'être l'auteur du "Grand Roman Américain". On dit que c'est le rêve de tous les romanciers américains. Et il ne fait guère de doute que c'était également l'ambition de Garth Risk Hallberg. Son travail pour atteindre son but est indéniable : précis dans la construction de chaque phrase, perfectionniste dans le choix de chaque mot, original par les documents qui illustrent son histoire, intéressant dans l'évocation du contexte historique, musical, sociétal de l'époque. Et pourtant... N'est pas Flaubert ou Balzac qui veut. L'écrivain n'échappe pas à de nombreux clichés. C'est lent, trop copieux et interminable !
Personnellement, j'ai décroché à la fin du Livre I (soit environ 170 pages), non pas à cause de la longueur du texte, ni à cause de quelques maladresses pardonnables, ni à cause d'un style un peu académique, mais à cause de la froideur des personnages. Des personnages qui, malgré tous les efforts de l'auteur, ne partagent aucune émotion, restent superficiels et manquent de profondeur. A vouloir être trop "parfait", l'auteur passe à côté de l'humain. 
Toutefois, d'autres lecteurs ont été happés par l'histoire de ce roman-événement. Pourquoi pas vous ?

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