dimanche 6 mai 2018

"La Bête" de Catherine Hermary-Vieille (Albin Michel/Livre de Poche)

Catherine Hermary-Vieille, née en 1943 à Paris, alterne avec succès biographies et romans historiques. Elle a reçu de nombreuses récompenses littéraires, dont le Prix Femina pour "Le Grand Vizir de la nuit", le Prix des Maisons de la Presse pour "Un amour fou" et le Grand Prix RTL pour "L'Infidèle". Elle vit aujourd'hui en Virginie, aux Etats-Unis. Elle partage sa vie entre l'écriture, sa ferme et de nombreux voyages en France.

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Histoire de la Bête du Gévaudan :

La "Bête du Gévaudan" est un animal à l'origine d'une série d'attaques contre des humains survenues entre le 30 juin 1764 et le 19 juin 1767. Ces attaques, le plus souvent mortelles, entre 88 à 124 recensées selon les sources, eurent lieu principalement dans le nord de l'ancien pays du Gévaudan, région d'élevage. Quelques cas ont été signalés dans le sud de l'Auvergne, et dans le nord du Vivarais et du Rouergue.

La "Bête du Gévaudan" dépassa rapidement le stade du fait divers, au point de mobiliser de nombreuses troupes royales et de donner naissance à toutes sortes de rumeurs, tant sur la nature de cette "bête" - vue tour à tour comme un loup, un animal exotique et même un loup-garou, voire un tueur en série à une époque plus récente - que sur les raisons qui la poussaient à s'attaquer aux populations - du châtiment divin à la théorie de l'animal dressé pour tuer.


Alors qu'une centaine d'attaques équivalentes se sont produites au cours de l'histoire de France dont toutes les régions sont peuplées par environ 20 000 loups à cette époque, ce drame intervient opportunément pour la presse en mal de ventes après la guerre de Sept Ans (conflit européen qui opposa, de 1756 à 1763, l'Angleterre et la Prusse à la France, l'Autriche, la Russie, la Suède, l'Espagne et des princes allemands). Le Courrier d'Avignon local puis La Gazette de France nationale et les gazettes internationales voient l'occasion de s'emparer de cette affaire pour en faire un véritable feuilleton, publiant des centaines d'articles sur le sujet en quelques mois.

De 1764 à 1767, deux animaux (l'un identifié comme un gros loup, l'autre comme un canidé s'apparentant au loup) furent abattus. Le gros loup fut abattu par François Antoine, porte-arquebuse du roi de France, en septembre 1765, sur le domaine de l'abbaye royale des Chazes. A partir de cette date, les journaux et la cour se désintéressèrent du Gévaudan, bien que d'autres morts attribuées à la Bête aient été déplorées ultérieurement. Le second animal fut abattu par Jean Chastel, enfant du pays domicilié à La Besseyre-Saint-Mary, le 19 juin 1767. Selon la tradition, l'animal tué par Chastel était bien la Bête du Gévaudan car, passé cette date, plus aucune mort ne lui fut attribuée.

(cf : Musée Fantastique de la Bête du Gévaudan à Saugues, Haute-Loire)

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L'histoire :
En Gévaudan, on dépend des saisons et de la nature. A l'approche de l'automne, les villages se préparent aux futurs assauts de l'hiver. Réserves de nourriture, de bois de chauffe et de balles pour les fusils, tout est prévu pour cinq mois d'autarcie. En cette fin du XVIIIème siècle, à La Besseyre-Saint-Mary, quand la blancheur hivernale occupe les lieux, la plus grande peur des paysans, ce n'est pas le froid, ce ne sont pas les loups, mais c'est cette forêt qui les entoure, qui les retient prisonniers comme des rats, son silence de mort et le Diable qui s'y cache...

Mon avis :

Catherine Hermary-Vieille s'empare de la légende, s'éloigne à dessein des faits établis pour s'intéresser à ce fil ténu qui sépare l'Homme de l'Animal. Son héros, Antoine Chastel, est un être brisé par la mort de sa mère lorsqu'il était enfant. Il est devenu un jeune homme inquiétant, complexe, solitaire. Assoiffé de liberté, il ne semble ressentir de l'empathie qu'au coeur de la nature et auprès des animaux, sauvages de préférence. Submergé d'autant de colère que de désir, il flirte dangereusement avec la folie. Saisons après saisons, épreuves après épreuves, il dépasse la dualité entre humanité et animalité et atteint progressivement les rives de la bestialité. Un voyage sans retour possible.

Un roman qui touche sa cible en plein coeur et qui donne à réfléchir.

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