mercredi 1 septembre 2021

"Les Mal-aimés" de Jean-Christophe Tixier (Livre de Poche)

 
Prix Transfuge du meilleur polar français 2019
Prix Méditerranée polar du premier roman 2019

Jean-Christophe Tixier est né en 1967 à Pau. Après vingt ans passés dans l'enseignement et la formation, il se consacre aujourd'hui totalement à l'écriture. Il a écrit une trentaine de romans dans des genres et pour des âges différents. Il est aussi l'auteur de nouvelles et de fictions radiophoniques qui ont été diffusées sur France-Inter. Début 2019 sont parus un roman adulte et une bande-dessinée dont il a écrit le scénario. Désormais, il partage son temps entre Pau et Paris.

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Quelques mots d'Histoire

(Eglise de Vailhauquès)
En juillet 1850, le Parlement français autorise la création de colonies agricoles pénitentiaires pour délinquants mineurs dans un but de punition et de moralisation. Est alors fondée, à Vailhauquès, dans l'Hérault, la colonie agricole pénitentiaire de Montlobre, dit "le bagne". Entre 1860 à 1884, l'institution basée sur les châtiments et le travail forcé verra passer près de deux mille garçons de huit à dix-huit ans. Les Archives Départementales de l'Hérault comptent plus de deux cents décès (connus) parmi les jeunes condamnés. Quelques-uns reposent dans le cimetière du "bois des enfants morts". Personne ne sait ce que sont devenus les survivants. Le domaine de Montlobre est aujourd'hui une propriété privée. Du "bagne", il ne reste, dit-on, qu'un escalier usé et des cachots tels qu'ils furent laissés lors de sa fermeture en 1884.

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L'histoire :

Vailhauquès, 24 février 1884

Les gosses quittent le bagne. Libres. Mais pour quelle autre prison ? Rachitiques, hagards, affamés, ils suivent les hommes armés sur le chemin sans connaître la destination, marchent dans la neige, grelottent. Au loin, un des gamins reconnaît le visage de la cantinière qui leur servait une soupe claire comme de l'eau en guise de repas ; celui de la lingère qui obligeait les punis à rincer le linge pendant des heures dans l'eau glacée du lavoir ; celui du gardien qui chaque soir choisissait une cellule différente mais d'où ils entendaient toujours les mêmes cris et les mêmes interminables sanglots.

Sur le bord de la route, une petite fille leur fait un signe de la main mais personne ne répond à son geste. De cet endroit de cruauté et de mort, au pied de la montagne, il leur en restera la mémoire. Et elle ne s'effacera jamais.

"Il se prend à espérer que jamais la bâtisse ne s'effondrera. Car il sait que tant qu'elle sera debout, ses murs épais garderont la mémoire de ce qu'ils ont vu et entendu. Tant qu'elle tiendra bon, les gens d'ici se souviendront. Et jamais ils ne pourront passer à autre chose. Jamais personne n'oubliera."

Dix-sept ans plus tard, à l'ombre des hauts murs noircis du bagne, la population de Vailhauquès a peur. Des phénomènes étranges et inexpliqués se multiplient : lueurs dans le cimetière, animaux malades, accidents mortels, feux de meules de foin... Les rumeurs se répandent. Pour certains, c'est l'oeuvre du diable. Pour d'autres, c'est pire encore : ce sont les enfants qui reviennent...

"Le diable. Les gens de la campagne ont toujours eu besoin d'attacher un mot ou une présence à chaque acte qui leur échappe."


Mon avis :

"Les Mal-aimés" est le genre de livres que l'on veut lire jusqu'au bout parce qu'il est vraiment beau mais que l'on tient à bonne distance des lunettes, comme si des éclaboussures de malheur pouvaient nous atteindre au-delà du papier et de l'encre des mots. Les monstres sont autant présents à l'intérieur du "bagne" qu'à l'extérieur. Chaque ferme de cette petite communauté rurale occitane de la fin du XIXème siècle abrite son lot de secrets inavouables. On espère en vain un peu de couleur dans cette peinture très noire d'une ruralité isolée, rompue à ses plus bas instincts primaires, et où le mot "Amour" n'a aucun sens. En tête de chaque chapitre, Jean-Christophe Tixier a eu l'excellente idée de rappeler le nom de quelques petits martyres du "bagne" et de retranscrire des extraits glaçants des registres d'écrou. En leur mémoire...

Coup de ♡ et coup au coeur...

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