jeudi 31 mars 2016

"Ascenseur pour l'échafaud" de Noël Calef (Livre de Poche) (1956)





Nissim Calef est né en 1907 en Bulgarie. Il s'installe en France dans les années 1930 où il prend le nom de Noël Calef et débute dans une compagnie cinématographique. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il sera interné à Drancy en 1941 avant d'être déporté en Italie. A la fin de la guerre, il rentre en France. Ecrivain de langue française, il publie une vingtaine de romans et de nouvelles, dont six romans policiers. Il devient célèbre grâce au film "Ascenseur pour l'échafaud". Il collabore également à de nombreux films en tant que scénariste ou dialoguiste. Il meurt en France en 1968.

Le livre :
Ce samedi après-midi, Julien Courtois, directeur d'une société d'import-export parisienne, annonce un peu tardivement à sa secrétaire, Denise, qu'il a un rendez-vous important à 18h30 et lui demande de rester jusque 18h20 car il aura certainement des dossiers à lui remettre pour lundi matin. A 17h40, Courtois met son plan diabolique à exécution. En premier lieu, il s'assure que, comme il le prévoyait, Denise est en grande conversation téléphonique avec une amie. Puis il referme la porte de son bureau, ouvre la fenêtre, enjambe le rebord, parcourt les quelques mètres de corniche qui le séparent d'une autre fenêtre, pénètre dans une pièce en travaux de rénovation, franchit un couloir après avoir vérifié que personne ne le surprendrait, et entre sans frapper dans le cabinet de Bordgris, prêteur sur gages à qui Courtois doit beaucoup d'argent. Courtois occupe le temps, baratine sur un hypothétique projet, jusqu'à la débauche de 18h. Quand les bureaux du building se vident bruyamment, Courtois profite du brouhaha pour abattre Bordgris d'une balle dans la tête. Il ne lui reste plus qu'à maquiller son homicide en suicide, effacer ses empreintes et rejoindre tout aussi discrètement son bureau avant 18h20. Hélas, il n'avait pas prévu l'horreur d'une blessure par arme à feu ni son évanouissement à la vue du sang. Revenu à lui juste à temps, il s'arrange pour être vu par le gardien et quitte l'immeuble pour rejoindre sa femme à qui il vient de promettre un nouveau bonheur. Il démarre sa voiture, il est prêt à partir quand il s'aperçoit que, dans la précipitation, il a oublié de prendre avec lui des documents compromettants. Laissant là sa Fregate, dont le moteur tourne encore, et dedans son imperméable et son portefeuille, il se rue dans l'ascenseur. Il n'en a que pour quelques minutes. Malheureusement, Albert, le gardien, persuadé qu'il n'y a plus personne dans les locaux, coupe l'électricité et part en week-end. L'ascenseur s'arrête brutalement. Julien Courtois se retrouve piégé...

Mon avis :
Un homme, acculé à ses mensonges et à ses malversations, va commettre un crime parfait. Mais à la vue du sang, il s'évanouit. Et soudain, le scénario impeccablement élaboré s'effondre. Evénements, coups de théâtre et tragédies se succèdent jusqu'à la scène finale, saisissante, qui tombe comme un couperet. De nombreux personnages se relaient dans ce drame inéluctable. Témoins d'une époque phallocrate et misogyne - les années 1950 - , à leurs conflits personnels et à leurs émotions se greffent des conflits générationnels, sociaux, économiques, culturels, les femmes qui ont encore tout à conquérir. Courtois est dominé par sa peur de tout perdre : l'argent, sa position sociale, sa femme. Denise, la secrétaire, est éprise de liberté. Geneviève, l'épouse, souffre de sa jalousie. La colère et la haine étouffent Georges, le beau-frère. Le jeune Fred cache la douleur de ses relations difficiles avec son père derrière une attitude désabusée et un machisme insupportable. La jolie Thérèse, sans travail, sans argent, n'est qu'amour et admiration pour son Fred, accepte toutes les humiliations, mais c'est à elle seule que reviendra la responsabilité de l'enfant qu'elle porte si Fred l'abandonne. Le policier, l'inspecteur Givral, aux allures d'un lieutenant Colombo à la française, s'avère beaucoup plus perspicace qu'il n'y paraît... Julien Courtois a commencé la partie, mais très vite il n'est plus qu'un pion sur l'échiquier. Chaque épisode de l'histoire amène implacablement à lui. Il est en prison dès les premiers instants. 
Un texte court, net, efficace. Une intrigue remarquable.
Un roman étonnant, totalement captivant !!!

Le film :

"Ascenseur pour l'échafaud" (1957), film français de Louis Malle avec Jeanne Moreau, Maurice Ronet et Lino Ventura. Musique de Miles Davis. Prix Louis-Delluc en 1957 et Grand Prix du disque de l'Académie Charles-Cros décerné au disque de la bande originale.

Quelques notes de musique :
https://www.youtube.com/watch?v=7Op1WDZk850

Louis Malle est né en 1932 à Thumeries, dans le Nord de la France. Assistant de Jacques-Yves Cousteau pour le "Monde du silence", c'est à l'âge de vingt-cinq ans qu'il réalise son premier long métrage "Ascenseur pour l'échafaud" en 1957. Il meurt en 1995 à Los Angeles.
"Les Amants", "Zazie dans le métro", "Vie privée", "Le feu follet", "La petite", "Calcutta", "Alamo Bay", "Au revoir, les enfants", "Milou en mai", "Fatale", "Vanya 42e Rue".

Jeanne Moreau et Miles Davis
Miles Davis (Alton, Illinois, 1926 - Santa Monica, 1991), compositeur et trompettiste de jazz américain. Il fut l'un des plus grands solistes et improvisateurs à la trompette, et l'un des pionniers du jazz cool et du jazz-rock.
"Walkin'" (1954), "Bye Bye Blackbird" (1956)

Mon avis :
Un scénario librement inspiré du roman et un propos différent. Là où le livre est une photographie du paysage social et culturel de la France des années 1950, le film, lui, est un hymne à Paris très esthétique, la nuit, en noir et blanc, porté par la musique envoûtante de Miles Davis, et dans lequel Jeanne Moreau, sublime, crève l'écran.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire