vendredi 7 décembre 2018

"Le dieu des cauchemars" de Paula Fox (Joëlle Losfeld)

Paula Fox est une romancière américaine, née en 1923 à New York. Fille d'un père irlandais et d'une mère espagnole, elle a grandi en Californie, à Cuba et au Québec. Après des études à l'université de Columbia, qu'elle a abandonnées pour se consacrer au piano, elle a exercé divers métiers, dont celui de reporter en Europe. Dans les années 1960, elle a enseigné à l'université de New York et de Pennsylvanie et a commencé à écrire à cette époque. Auteur d'une vingtaine de livres pour enfants et adolescents, abordant les mêmes thèmes que ses romans "adultes" (les faux-semblants, la douleur de l'abandon, la lutte des femmes), son oeuvre a été couronnée par le Prix Andersen en 1978. Redécouverte en 1996 par l'écrivain américain Jonathan Franzen ("Les corrections", "Freedom"), l'éditrice Joëlle Losfeld participera à sa notoriété en France en traduisant et publiant ses romans : "Le dieu des cauchemars" (sélection Prix Femina, 2004), "Personnages désespérés" (2004), "La légende d'une servante" (sélection Prix Femina, 2005), "Pauvre Georges" (2006), "Côte Ouest" (2007), ses mémoires,"Parures d'emprunt" (2008), "Les enfants de la veuve" (2010). Paula Fox est décédée en 2017 à Brooklyn. Elle était la grand-mère de la rockeuse Courtney Love.

L'histoire :

Poughkeepsie (Etat de New York), printemps 1941...

Une lettre, reçue ce matin, annonce à Helen la mort de son père, Lincoln Bynum. Eleveur de chevaux de course ruiné, Bynum avait quitté le domicile conjugal treize ans plus tôt, abandonnant un ranch vide à sa femme et à sa fille alors âgée d'une dizaine d'années. Si sa mère est bouleversée, Helen n'éprouve pas la même peine pour ce père qu'elle a si peu connu. Accablée de chagrin, la mère demande à Helen de se rendre à La Nouvelle-Orléans afin de retrouver sa soeur, actrice, et de la ramener auprès d'elle, le temps d'apaiser sa tristesse.

La Nouvelle-Orléans (Louisiane), quelques jours plus tard...

C'est la première fois que Helen vient à La Nouvelle-Orléans. Elle découvre des couleurs, des parfums, des fleurs, des fruits, des légumes et des poissons qu'elle n'avait encore jamais vus, des sons et des instruments de musique qu'elle ne connaissait pas, une moiteur et une langueur qui n'existent nulle part ailleurs, mais surtout, un sentiment de liberté qu'elle n'osait imaginer. La jeune femme s'imprègne de cette ambiance nouvelle, goûte à d'étonnants mets, se laisse envoûter par la ville. Au bout d'une semaine, elle se rappelle sa Tante Lulu. Il serait raisonnable de lui rendre enfin visite.

Mais la danseuse de music-hall d'antan a perdu de sa superbe. Vieillie, abîmée par les excès, alcoolique, et le coeur brisé, la flamboyante rousse dont sa nièce se souvenait est étendue, nue, dans le lit d'une chambre crasseuse, ivre-morte. Helen prend soudain conscience que sa tante ne reviendra jamais à Poughkeepsie. En l'envoyant à La Nouvelle-Orléans, sa mère le savait. C'était une façon de se débarrasser de sa fille, d'éloigner d'elle cette enfant qu'elle espérait tant être la raison du retour de son mari, mais cet espoir est mort avec Lincoln Bynum...

Mon avis :

Une jeune fille, bouleversante de naïveté, quitte l'emprise d'une mère tantôt aimante, tantôt fantasque, pour découvrir une ville ensorcelante où tout semble facile. Elle est accueillie chaleureusement par un groupe d'intellectuels, d'artistes et de gens de lettres, et croit en leur amitié et leur sincérité. Mais derrière la distinction, les belles manières et le luxe ostensible se cache la cruauté froide et perverse d'une entre-soi artificiel et indifférent au reste du monde.

Une écriture sensible et poétique pour ce très beau roman sur les désillusions.

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