jeudi 2 avril 2015

"RAVAGES" de Violette Leduc (Folio)





"Ravages"
Violette Leduc
(Folio)




Engagement : Féminisme

Violette Leduc est née à Arras en 1907, des libertés prises par un bourgeois sur sa femme de chambre. Enfant de la honte et du silence, interne au collège de Douai, Violette vit une histoire d'amour passionnée avec une camarade, Isabelle, puis avec une jeune surveillante, Denise. Mais leur relation est découverte et les deux jeunes femmes sont renvoyées de l'établissement.
En 1926, Violette suit sa mère et son beau-père à Paris, rate son baccalauréat, s'installe dans un meublé avec Denise, trouve un petit boulot chez Plon, rencontre de nombreux écrivains, et quitte Denise.
En 1938, elle fait la connaissance de Maurice Sachs, écrivain aventurier dont elle tombe éperdument amoureuse, mais il est homosexuel. Elle épouse alors, en 1939, un photographe, Jacques Mercier. Le couple se sépare un an plus tard. Violette, enceinte de cinq mois et demi, se fait avorter et frôle la mort. Cette expérience dramatique sera longuement décrite dans "Ravages". Encouragée par Maurice Sachs, elle écrit ses souvenirs d'enfance. "L'Asphyxie" commence par cette célèbre phrase : "Ma mère ne m'a jamais donné la main".
En 1945, Violette Leduc est présentée à Simone de Beauvoir qui reconnaît son talent et suivra son travail. Estimée par Jean Cocteau, Jean Genet, Marcel Jouhandeau, Nathalie Sarraute et Jean-Paul Sartre, éprise de Simone de Beauvoir (sans réciproque), elle entame la rédaction de "L'Affamée", poème en prose consacré au "Castor". 
En 1947, elle s'éprend de Jacques Guérin, bâtard comme elle, riche industriel, collectionneur de livres rares, de manuscrits et d'oeuvres d'art, ami d'artistes et d'écrivains, mais homosexuel, comme Sachs. Il sera néanmoins son ami et son plus fidèle soutien pendant de nombreuses années. Dans le même temps, Simone de Beauvoir décide de verser à Violette une pension mensuelle afin qu'elle puisse se consacrer entièrement et librement à l'écriture.
En 1954, alors que Simone de Beauvoir reçoit le Prix Goncourt pour "Les Mandarins", Violette Leduc est victime de la censure éditoriale. Gallimard ôte les cent cinquante premières pages de son roman "Ravages". L'auteur y décrivait les ébats passionnés de deux collégiennes, Thérèse et Isabelle. Profondément blessée par cette décision, elle est internée pendant un an en clinique psychiatrique et en maison de repos pour ses tendances paranoïaques.
Puis, en 1961, grâce à une amie, elle découvre son petit paradis terrestre à Faucon, un petit village du Vaucluse, et s'y réfugie pour continuer la rédaction de "La Bâtarde", une autobiographique romanesque, et qui paraît en 1964. Le succès est immédiat et le livre frôle le Prix Goncourt. Violette Leduc a 57 ans. Par soucis de la mettre "sur un pied d'égalité et lui permettre de s'acquitter de ses complexes d'infériorité", Simone de Beauvoir exige le remboursement des sommes qu'elle lui versait depuis 1949. Violette Leduc continue à publier régulièrement. En 1970 paraît "La folie en tête" fortement censuré par Simone de Beauvoir. Souffrant d'un cancer du sein, Violette Leduc s'installe définitivement à Faucon où elle meurt en 1972. Simone de Beauvoir est nommée héritière de ses droits littéraires et publie "La chasse à l'amour" en 1973.

Pionnière de l'autofiction ou "l'écriture de soi", ses expériences douloureuses ont nourri l'oeuvre de Violette Leduc. Elle y évoque la campagne de son enfance, la Seconde Guerre mondiale, le Paris des années 1950. Elle y révèle la psyché féminine avec une liberté de ton sans pareil. Elle écrit souvent dans les bois, ou en blouse de ménagère dans sa cuisine microscopique, ou encore dans la chambre de Jean Marais, chez Jean Cocteau. Sexualité, homosexualité, avortement, l'écrivaine Violette Leduc abordait sans détour les sujets tabous des années 1950 et 1960. La beauté crue et poétique de ses textes exalte l'amour sous toutes ses formes. Sa manière de dire l'érotisme au plus près de ses sensations est précisément ce qui inspire quelques écrivaines d'aujourd'hui.

"Une femme descend au plus secret de soi et elle se raconte avec une sincérité intrépide, comme s'il n'y avait personne pour l'écouter."
Simone de Beauvoir

L'histoire :
Un dimanche après-midi, dans une salle de cinéma bondée, sans quitter du regard l'écran sur lequel est projeté un film policier américain, une femme offre une cigarette à son voisin. L'homme accepte. Commence alors un flirt silencieux, timide. Après la séance, dans les rues de Paris, l'homme et la femme jouent au chat et à la souris, ils se suivent et se fuient. Puis l'homme aborde enfin la femme et engage maladroitement la conversation. La femme hésite, ne décide pas, se laisse porter. L'homme est étrange mais sympathique. Elle n'ose pas le repousser. Un bar. Puis un autre. Et encore un autre. Un restaurant. Et puis l'hôtel. La femme n'aime pas les hommes. Mais les amours entre gens du même sexe ne s'avouent pas. Alors elle se fait violence. Cet homme-là, malgré sa gentillesse, son corps nu près d'elle, comme le corps de n'importe quel homme, lui donne la nausée. Elle ne peut pas. Lui dit la vérité. Il comprend. Lui promet de l'aider à rejoindre son amante. Elle se refuse encore. Ils s'endorment...

Mon avis
Une très belle écriture poétique mais un style très personnel et curieux, kaléidoscope de scènes entre abstraction et surréalisme, rêves et fantasmes, homosexualité à la fois assumée et refoulée. Ou on aime passionnément. Ou on déteste. A mon plus grand regret, j'avoue douloureusement que l'auteur me touche profondément, sa vie romanesque et tragique me bouleverse, mais ses mots me plongent dans le plus grand désarroi.
Ne tenez pas compte de ma sensibilité sans doute trop rationnelle, trop rigoureuse ! Découvrez Violette Leduc ! Je suis persuadée que beaucoup de lecteurs seront envoûtés !

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