Harry Crews, romancier américain, est né en 1935 en Géorgie (Etats-Unis) et décédé en 2012 en Floride. Orphelin de père à deux ans, il est élevé à la dure dans une ferme par un beau-père alcoolique et violent qui fera de sa petite enfance un enfer raconté dans son autobiographie "Des mules et des hommes". Engagé à dix-sept ans dans les Marines, Harry Crews fait la guerre de Corée, commence à dévorer tous les ouvrages qui lui tombent sous la main, reprend des études puis plaque tout pour faire la route. Il fera de la prison, se fera tabasser par un Indien unijambiste, partagera un temps la vie des freaks et croisera des destins hors du commun qui peupleront ensuite ses romans. De retour en Floride, il abandonnera femme et enfant pour se retirer dans une cabane au bord d'un lac. C'est dans ce décor d'ascète, stimulé par la came et l'alcool, qu'il débutera comme écrivain. Son oeuvre, une vingtaine de livres tous situés dans le sud des Etats-Unis, a fait de lui, avec des titres comme "Body" ou "La malédiction du gitan", un auteur totalement atypique particulièrement attachant, souvent féroce avec les gens normaux et tendre avec les monstres : un auteur qui s'ingénie à prendre le contre-pied de l'apparente normalité des choses pour fustiger la bêtise, et qui s'est imposé, dans la plus grande discrétion, comme l'un des plus grands écrivains américains de romans noirs.
- "Les portes de l'enfer" (Sonatine)
- "Nu dans le jardin d'Eden" (Points)
- "La malédiction du gitan" (Folio)
- "Le Chanteur de Gospel" (Folio)
Il apparaît au cinéma dans le film de Sean Penn, "The Indian Runner" (1991), dans le rôle de M. Baker. Son roman "The Hawk is Dying" ("Le Faucon va mourir") a été adapté en 2006 sous le titre "Dressé pour vivre" par Julian Goldberger, avec Michelle Williams et Paul Giamatti.
L'histoire :
La petite ville de Mystic, en Géorgie, prépare activement la Fête des Serpents, manifestation locale qui attire chaque année de plus en plus de visiteurs, et parmi eux un certain nombre de cinglés. Quelques-uns viendront avec leurs animaux de compagnie enroulés autour de leur cou pour quelque concours ou rencontre entre aficionados. Il y aura des stands de produits divers liés aux reptiles et d'objets artisanaux fabriqués en peau de serpent. Des spectacles de danse acrobatique seront donnés par les pom-pom girls de l'équipe de football du lycée, les Crotales Fatals. Les majorettes arboreront fièrement un tee-shirt à l'effigie d'un serpent pailleté lové au creux de leurs seins. Les festivités se poursuivront avec l'élection de la Reine des Crotales. La bière coulera à flots, et après les combats de chiens, la journée se clôturera autour d'un serpent de papier géant transformé en feu de joie. Le lendemain, lorsque tout le monde sera bien dans l'ambiance, commencera la chasse aux serpents. Ceux-ci seront ensuite rassemblés dans une fosse, construite à cet effet au milieu du terrain de football. Des prix seront décernés en fonction de la taille, du poids, et de l'heure de capture des reptiles. Les gastronomes pourront les déguster plus tard lors du barbecue. De bien belles réjouissances, mais qui, pour les autochtones, ne veulent rien dire et ne changeront rien à leur quotidien maudit. Les miséreux seront toujours aussi crève-la-faim, les alcoolos aussi bourrés, les sadiques aussi cruels, les gros dégueulasses aussi répugnants, les paumés aussi minables. La vie sera toujours aussi reptilienne : onduleuse, sinueuse, sournoise, perfide...
Mon avis :
Ce roman formidable diffuse implacablement une atmosphère vénéneuse redoutable. C'est une tragédie pessimiste, amère, inéluctable, dans laquelle les serpents grouillent de partout et personne ne semble pouvoir échapper au poison de la fatalité et de la folie. Un énorme coup de coeur !!!
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